mardi 28 janvier 2014

Exercices d'amour (Pericle Patocchi)

Edvard Munch, La vigne vierge rouge, 1898-1900


Sueur d’insomnie
                             croisée
aux fougères devant l’aube

et le coq enroué du remords

l’instant vacille au faîte
de ma pensée
                      je sors
de  mes souvenirs pardonné


*


L’autre était l’autre le vrai
mon visage sans moi-même
je pouvais le saluer
sans rougir dans le miroir

je le vis même de dos
sur le seuil de la porte
                                   un homme
qui s’acheminait vers le jour


*


A contre-courant du sommeil
je descends l’avenue
                                 l’asphalte
m’ouvre ses pentes de pierre
sous l’averse
                    les portes
sans lumière
                    les talons
qui martèlent les trottoirs
m’avertissent que la ville
creuse la nuit


*


Je traverse son rêve elle chante
pendant que je marche
                                      je pleure
tous ses matins oubliés

et me voici à l’entrée
de ses prunelles
                         je vois
de mes yeux et dans les siens
une rue pleine de gens


*


L’envie de mourir
                              l’ancienne
pâleur d’une image abolie
je les mords à belles dents
                                           je souris
au vieux soleil quotidien

à qui voit les derniers arbres
s’allumer au fond des rues
                                           la journée
ouvre son ventre qui saigne


*


Une boule d’air t’enroule
et t’enlève à la nuit

le souffle court
           le cri
du bouvreuil tire les bois
des prunelles ensevelies
sous les paupières

le pain
est là sur la nappe
                             pétri
de soleil et de larmes


*


Arpenteur d’une courbe
qui tranche le ciel
tu te dresses et les pierres
sont si lointaines
                          des plaines
qui s’estompent à tes pieds
tu te penches
                     là-bas les orties
griffent le bleu

une fille survient
                           son regard
est à la taille de tes yeux


*


Il visite une feuille
                              l’esprit
plane au loin sur les eaux

il tournoie vers la lumière
le voulant sans le vouloir

quand il rentre dans  ses membres
il s’aperçoit qu’au soleil
une ombre coule
sans arrêt de son corps


*


Tu es entré dans le vacarme
de tous les bruits assemblés
          le silence
le beau silence a chanté

à ce moment tu as reconnu
le son du nom qui te nommait

et maintenant tu lèves
ton visage vers ton nom
quel flot t’enlève ?
                             tu cours
à travers champs délivré



© Pericle Patocchi



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